Mais qu'est-ce donc, me direz-vous ?
Je vais vous avouer que ce fut compliqué d'aborder ce sujet car ce n'est pas un sujet simple. Je vous préviens de suite que cet article va être long, il est marqué par la culture mais aussi par la politique. Ce sujet n'est pas tabou mais il est très controversé, je m'appuies donc d'une analyse d'un maître de conférence en ethnologie pour vous l'expliquer.
Tout d'abord, quel est le sujet en lui-même ?
Le Mwâ Kââ est un "totem" kanak de 12 mètres qui se trouve à Nouméa sur la place du même nom en face du Musée de la Nouvelle-Calédonie. Mwâ Kââ signifie la grande case en langue djubea du sud de la Grande Terre, ce qu'il faut interpréter comme : « La maison des hommes du pays ».
Le bois choisi est le houp, bois imputrescible qui est utilisé traditionnellement pour le poteau central de la grande case, et celui qui a été choisi pour le Mwâ Kââ est considéré comme antérieur à l’arrivée des Européens. Le poteau lui-même est parfois appelé « le vieux » et certains s’adressent directement à lui dans leurs discours.
Le poteau, en lui même, est posé au centre d'une pirogue dont il représente le mât, ou aussi le poteau central de la case. Il se compose de huit totems réalisés par différents artistes, les sculptures qui l'ornent représentent les huit aires coutumières kanak, accompagnées de flèches faîtières plantées sur le flanc et à son sommet. A raison d’un mètre par aire coutumière, les sculptures entremêlent des références aux mythes fondateurs et à l’histoire de la colonisation. Se lisant de bas en haut, deux mètres sont enterrés, représentant la part des ancêtres, la fondation kanak du pays, tandis que le sommet est la part du vivant, « la case où tout le monde doit se retrouver », représente le futur du pays. La colonisation est rappelée dans les sculptures de deux aires coutumières : Hoot Ma Whaa Hap en bas, qui a vu arriver les bateaux européens, Djubea Kaponé, au sommet, qui a ressenti le plus vivement la colonisation avec la fondation de Nouméa sur ses terres. Le sculpteur de cette dernière a ainsi représenté un vieux guerrier les armes à la main pour signifier qu’il ne les a jamais déposées. Le rappel du drame kanak est ainsi une nécessité qui transparaît dans l’initiative du Mwâ Kââ.
La représentation d’une liane d’igname sauvage à l’arrière du poteau, fait la jonction entre les sculptures des différentes aires coutumières en les encerclant et signifie l’unité du peuple kanak.
Pour le finaliser, une inscription est gravée sur un bloc de pierre qui rappelle que : « Le passé a été le temps de la colonisation, le présent est le temps du partage par le rééquilibrage, l’avenir doit être le temps de l’identité partagée dans un destin commun… ».
A ses côtés se trouve une autre sculpture : un vieux barreur. Il représente « l’homme du pays » sous toutes ses formes, invitant toutes les communautés sur la « grande pirogue du destin commun ».
Pour compléter le tout, un passage du préambule de l’accord de Nouméa est gravé sur une plaque de nickel. L’ensemble est disposé au bout d’une allée de pins colonaires, parmi un aménagement paysager qui associe chaque végétal à une composante ethnoculturelle.
Quel est la raison de ce monument ?
L'initiative du Mwâ Kââ a été lancée en 2003 par le comité 150 ans après à l'occasion du 150ème anniversaire de la prise de possession de la Nouvelle-Calédonie par la France, le 24 septembre 1853, dans un geste de ralliement de tous les gens du pays en un seul peuple et dans un avenir commun.
Quels ont été les problèmes rencontrés ?
En fait, l’ensemble de son aménagement s’est étalée sur deux ans et cela ne s’est pas fait sans heurts.
Ainsi l’implantation du Mwâ Kââ sur la place des Cocotiers, le centre historique de Nouméa, a été refusée par la municipalité de Nouméa. Jacques Lafleur avait alors temporisé en accueillant provisoirement le poteau sculpté dans les jardins du siège de la province Sud, avant de se raviser et d’exiger le déménagement du poteau avec les tensions marquant l’approche des élections provinciales en février 2004.
L’installation sur un espace proposé par la ville, face au musée de Nouvelle-Calédonie, avait déjà été lancée, puis confirmée plus tard par les collectivités territoriales après une période d’interruption du projet d’aménagement.
En 2004, le Mwâ Kââ rejoigna donc son emplacement définitif.
En 2005, il était inauguré officiellement avec son aménagement paysager et l’adjonction du vieux barreur. Dans le même temps, la place qui l’accueille fut rebaptisée Place du Mwâ Kââ et la journée du 24 septembre déclarée « journée de la citoyenneté » par le nouveau gouvernement du Pays, date qui dorénavant donne lieu à un jour férié et une commémoration officielle autour du « vieux ».
A ce jour, des personnes campent dans ce jardin, donc je n'ai jamais osé y pénétrer par respect pour eux (donc pas encore de photos). Mais ceci est une autre histoire...
Bizarre... vous avez dit bizarre...
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